Desinfox coronavirus : pourquoi les médias n'en voulaient pas ?

Desinfox coronavirus : pourquoi les médias n'en voulaient pas ?

Mise en ligne le 23 avril et retirée le 5 mai, la rubrique "Désinfox coronavirus" pour lutter contre les fake news du gouvernement a fait un passage éclair sur la toile. En cause ? Les journalistes estimaient que l'initiative portait atteinte à la liberté de la presse.

« Desinfox Coronavirus ». C’était la dernière initiative du gouvernement pour lutter contre les fake news sur le COVID-19. La rubrique référençait les articles extraits des services de fact-checking de certains médias : les Décodeurs du Monde, CheckNews de Libération, Fake Off de 20 Minutes ou encore Vrai ou fake de France Info. Face aux critiques des journalistes, la rubrique a été supprimée le 5 mai.

Pourquoi les journalistes étaient-il contre la rubrique ?

Il faut savoir tout d'abord que les médias n'étaient pas au courant de la mise en place de cette rubrique "Desinfox Coronavirus". Ils ont appris son existence une semaine après sa mise en ligne à travers un tweet de la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Autant dire qu'ils auraient déjà apprécié qu'on les tienne au courant de l'utilisation de leurs articles en dehors de leurs propres réseaux de diffusion.

L'histoire aurait pu s'arrêter là. Référencer des articles de médias différents, ça n'a rien de méchant. Et en plus, ça leur fait de la visibilité. Alors pourquoi les journalistes ont-ils réagi aussi âprement ? Parce que l'initiative a été prise par le gouvernement. En France, un accord tacite a été pris entre le pouvoir politique et les médias, c'est-à-dire que le gouvernement n'a pas à interférer dans les affaires de la presse. C'est ce que l'on appelle la liberté de la presse. Cela permet aux journalistes d'exercer le "quatrième pouvoir" pour contre-balancer les 3 autres : le pouvoir exécutif, le législatif et le judiciaire. En faisant une sélection des articles comme étant "vrais", les autorités se sont érigées en arbitre de l'information et ont porté atteinte à l'indépendance des rédactions.

Pour les médias, ce n'est surtout pas le moment de flouter la barrière qui sépare les politiques des journalistes, la confiance des Français envers les deux entités étant déjà au plus bas en cette période de crise.

« Notre bien le plus précieux, c’est notre indépendance. Ce genre d’opération ne peut qu’introduire de la défiance et de la suspicion quant aux relations entre la presse et le monde politique.  »
Paul Quinio, directeur délégué de la rédaction de Libération.

Média 1 vs gouvernement 0

Tout de suite après le tweet de la porte-parole du gouvernement, les directeurs de rédaction sont montés au créneau : tweets, tribunes... Face aux protestations, Sibeth Ndiaye avait promis : "cette page a vocation à être supprimée une fois la crise terminée." Mais les journalistes ne se sont pas arrêtés là. Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a déposé le 4 mai un référé-liberté pour atteinte à la liberté de la presse. Le lendemain, le gouvernement supprimait sa page.

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