Pourquoi les pubs à la radio sont nulles ?
Délaissée par les annonceurs, la publicité à la radio s’est transformée en une place du marché où chacun crie le nom de son produit et son prix. Pourtant des communicants se battent pour remettre de la créativité sur les ondes.
7 heures du mat’, je suis coincée dans les bouchons en direction des bureaux de HUSH. A la radio, les pauses publicitaires s’enchainent. Comme je n’aime pas zapper, je continue de les écouter mais quelle plaie ! Malgré quelques rares spots bien construits, j’assiste à un défilé de slogans musicaux qui tournent en boucle. C’est sûr, à force, ça finit par rentrer dans la tête. Mais je vous jure, si je tombe un jour dans un magasin sur cette bouteille de vin rosé qui a forcé l’entrée de ma mémoire, je m’enfuis illico presto. J’aurais trop peur qu’elle se mette elle aussi à chanter…
La radio, parent pauvre de la publicité
Mais pourquoi la pub à la radio est-elle encore plus nulle qu’ailleurs ? Les annonceurs préfèrent investir leur budget pour la télévision ou Internet. Quand arrive la question des ondes, il ne reste plus grand-chose au fond du porte-monnaie. Il faut faire avec les moyens du bord et concocter un spot maison. Bah oui, pourquoi faire appel à un pro de la com’ pour enregistrer 30 secondes de son ? « Mettre la marque 5 fois, le nom du canapé et répéter le prix 3 fois, tout le monde peut écrire un spot radio, si l’on prend la radio sur cet axe-là », se désespère François Barbe, fondateur de la maison de production sonore Men at Work.
La radio est ainsi devenue un média commercial, où l’on cherche avant tout à faire du chiffre. C’est pourquoi on retrouve principalement des spots pour annoncer une grosse promotion sur tel ou tel produit. « La radio permet d’exprimer une offre de façon très claire pour inciter les gens à une action. Comme ces derniers écoutent principalement la radio en voiture, ils peuvent aller faire un crochet au magasin dont on vient de parler », analyse Gregory Tormo, concepteur-rédacteur. Tout ceci au détriment de la créativité.
« A la radio, l’écran est plus grand »
L’autre aspect qui empêche les spots radio d’être sympas ? Les contraintes légales. Vous savez, ces phrases dites à toute vitesse à la fin des pubs pour expliquer que l’offre est soumise à conditions, dans une durée limitée, etc. A la TV, ces mentions défile à toute allure dans un bandeau en bas de l’écran et ça ne gêne personne. Pour la radio, c'est une autre histoire : « Il n’est pas rare d’avoir 5 secondes de mentions légales, voire même 10 secondes en fonction des secteurs. On se retrouve à essayer de faire rentrer 40 secondes dans du 30 secondes », estime François Barbe.
Pourtant, bien utilisée, la radio pourrait être un formidable support pour raconter de belles histoires. Orson Welles lui-même estimait que « à la radio, l’écran est plus grand ». Pour Marine Thömmerel, comédienne voix off, le pouvoir de la voix peut même être plus fort « que la lecture ou l’image » : « Une voix peut avoir le pouvoir d'apporter tellement de choses sur le plan de l'imagination et de la curiosité mais aussi du réconfort, de la chaleur, le fait de se sentir moins seul. »
Les webradios au secours de la publicité radio
Persuadé que la publicité radio a un bel avenir, François Barbe se bat depuis plusieurs années pour lui redonner ses lettres de noblesse. Il a par exemple créé la Battle Radio Factory, une compétition inter-agences de création publicitaire radio. Dans la même optique, le salon de la Radio et de l’Audio digital récompense depuis 2018 les professionnels les plus innovants du secteur à travers des Grands Prix comme le Radio Pub Awards. L’objectif ? « Rendre la radio aux créatifs des agences qui savent très bien faire ce métier finalement », estime François Barbe. Pour Grégory Tormo, l’avenir de la publicité radio peut se jouer sur un autre terrain : celui du digital. « Grâce aux webradios, on peut savoir à peu près qui est en train d’écouter et à quel moment. Ça crée des opportunités en termes de création qui sont intéressantes. On peut faire un spot presque sur-mesure. »
Une chose est sûre, l’audio n’a jamais pris autant de place aujourd’hui avec l’essor des assistants audios et des podcasts. Autant d’opportunités que la radio peut saisir pour tirer son épingle du jeu.